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La procédure d’extinction des comportements indésirables



Mais de quoi s’agit-il ?

On parle de procédure car elle fait partie des outils de l’analyse appliquée du comportement et n’a de sens que si elle est utilisée au regard de l’ensemble des outils que comprend cette science.

Souvent, nous pouvons entendre le raccourci, « faire extinction, c’est ignorer le comportement». Dans un sens oui mais, pas seulement et pas n’importe comment si l’on veut que cela fonctionne.


"L'extinction en tant que procédure se produit lorsque le renforcement d'un comportement préalablement renforcé est interrompu; par conséquent, la fréquence de ce comportement diminue dans le futur. » Heward et al. (2005).

Qu’est ce que cela veut dire? En gros, cela revient à la « non-présentation/apparition » des conséquences qui sont habituellement associées à un comportement définit.

Exemples : habituellement un enfant hurle dans le magasin, il obtient le jouet désiré ➡️ si l’on fait extinction du comportement de hurler, alors lorsque l’enfant hurle il n’obtient pas le jouet.

Le collègue Jean-Robert fait inlassablement la même blague douteuse. Son acolyte, Jean-Roger rit systématiquement (= renforçateur social) ➡️ Jean-Roger part à la retraite, il n’y a plus personne dans l’équipe pour rire à la blague de Jean-Robert, il finit par arrêter de la faire.


Lecestre et Keser (https://www.ba-eservice.info/extinction ) expliquent , « L’extinction est une procédure importante et très efficace. Toutefois, elle est souvent mal comprise, mal interprétée ou mal appliquée... et donc n'apporte pas les résultats escomptés. Il est important de noter que l'extinction, si elle diminue la fréquence d'apparition d'un comportement, n'apprend pas de comportement alternatif répondant à la fonction du comportement. Il est important de toujours renforcer les comportements adéquats à coté de l'extinction. Il existe pour cela des procédures: les renforcements différentiels. » C’est ce que nous allons voir un peu plus loin.


Par ailleurs, un élément essentiel à savoir et à anticiper est que lorsque que l’on met en place une procédure d’extinction il faut s’attendre à des effets comportementaux additionnels (on pourrait dire en simplifiant « effets secondaires » à l’extinction ). Et oui, l’individu peut en effet montrer de la détresse, puisque le comportement qu’il émettait jusqu’à présent lui permettant d’obtenir la source de renforcement, ne fonctionne désormais plus. Il va donc bien souvent chercher à tout faire pour l’obtenir de nouveau. On aura alors :


  • Le pic d’extinction : c’est la recrudescence du comportement, qui va flamber avant de finir par diminuer. ⚠️ c’est un phénomène indispensable à connaître car il faut s’y préparer, cela va être difficile mais c’est là qu’il faut tenir si l’on souhaite que l’extinction fonctionne. Evidement, vous l’aurait comprit, dans l’extinction il faut que tout l’entourage s’y tienne aussi, puisque si l’on redonne accès une fois au renforçateur (R+), l’extinction n’aura pas lieu (résistance) car cela aura donné encore plus de puissance au R+ (puisqu’on est intervenu sur la déprivation, cf. Article précédent ici . D’un point de vue neuropsychologique on pourrait dire qu’il y a réactivation du circuit de la récompense).



  • La variabilité opérante : l’individu va tenter toutes sortes de choses pour obtenir son R+ (ex: l’enfant qui hurle dans le magasin pourrait se mettre à supplier; taper des pieds ou renverser les rayonnages; dire : « t’es méchant.e »…).

  • La force du comportement : l’individu va redoubler d’effort, il y aura une plus grande intensité et force du comportement pour obtenir le R+ (ex: l’enfant va hurler plus fort).

  • Des comportements émotionnels peuvent apparaître, soit sur l’environnement, soit auto- ou hétéro-agressif (ex: le distributeur de boissons de la gare dysfonctionne, un voyageur met une pièce et le produit sélectionné ne tombe pas, le voyageur tape du poing sur la machine).

  • L’extinction discriminée : lorsque l’on apprend à émettre un comportement dans un contexte, bien souvent on apprend aussi à émettre ce comportement dans un contexte similaire. En revanche, lorsqu’il y a extinction dans un des contextes, l’organisme discrimine une situation de non renforcement dans ce contexte et pas nécessairement dans le contexte similaire (ex: le comportement de l’enfant se modifie lors des courses avec les parents mais pas avec les grands-parents).

  • La résistance à l’extinction (on pourrait également appeler cela la persévérance comportementale) si la mise en extinction n’a pas lieu suffisamment longtemps, l’extinction ne perdurera pas (ex: manque de cohérence dans l’entourage de l’individu, un des membre de la famille renforce le comportement tandis que les autres tentent de mettre en extinction).

  • La récupération spontanée. Après le niveau 0 atteint du comportement, l’individu va retenter l’émission du comportement au même niveau que celui de départ avant la mise en extinction. Ex: un nouveau collègue rejoint l’équipe, Jean-Robert tente à nouveau sa blague, si le nouveau collègue ne rit pas, l’extinction sera maintenue, sinon risque de résistance à l’extinction.

Voici pour la première partie de la mise en extinction. Mais à ce stade la procédure est incomplète à la fois au niveau éthique et en terme d’efficacité.

N’oublions pas que tout comportement a une fonction et que cette fonction répond à un besoin. Le comportement permet donc l’accès à un renforcement et produit un effet dans l’environnement. Si, alors le comportement n’est plus renforcé, celui-ci perd sa fonction.

Ainsi, pour débuter une mise en extinction il faut au préalable avoir bien ciblé et définit le comportement à éteindre et savoir quel comportement alternatif/adapté l’on souhaite enseigner pour répondre à la fonction de départ.

Pour cela il faut avoir fait une analyse fonctionnelle du comportement, c’est à dire avoir repéré les contingences du comportement : ses antécédents et ses conséquences (à nouveau je vous renvoie à l’article précédent ici).

L’enseignement d’un comportement parallèle à celui que l’on souhaite éteindre c’est ce que l’on appelle le renforcement différentiel. Il s’agit de la mise en place de comportements alternatifs adaptés qui rentreront en « compétition » avec le comportement mis en extinction. C’est ce qui rendra la procédure d'extinction encore plus efficace.

Il existe différentes formes/types de renforcements différentiels, je vais vous exposer les plus courant :

  • Le renforcement différentiel alternatif (DRA) : il s’agit du renforcement des comportements adaptés alternatifs au comportement indésirable qui sont émis par l’individu.

  • Le renforcement différentiel des autres comportements (DRO) : procédure au cours d'une période de temps spécifique qui consiste à renforcer tous les comportements à l’exception de celui dont on veut diminuer la probabilité d’apparition.


  • Le renforcement différentiel des comportements incompatibles (DRI) : procédure consistant à renforcer le(s) comportement(s) incompatible(s) avec le comportement dont on veut diminuer la probabilité d’apparition.


  • Le renforcement différentiel des comportements à faible débit (DRL) : il ne s’agit pas au sens strict d’une procédure mais plutôt d’un programme de renforcement. Cela consiste à renforcer un comportement uniquement s’il se présente selon une fréquence donnée, que l’on diminue progressivement en vue d’atteindre un niveau considéré comme acceptable.


  • Le renforcement différentiel de débit élevé de comportements (DRH) : le renforcement a lieu lorsque le comportement cible se produit un nombre supérieur de fois à un critère établi sur un intervalle de temps donné.

✅ Reprenons nos exemples en y a appliquant les renforcements différentiels.

L’enfant qui hurle dans le magasin, avant qu’il ne hurle de préférence, nous pouvons :

  • Renforcer lorsque l’enfant dit que ça le met en colère, qu’il est fâché de ne pas pouvoir avoir son jouet (DRA).

  • Lui confier un petit panier avec sa propre liste de course ; lui faire chanter une comptine (DRI)

  • Le féliciter et le valoriser de nous aider à faire les courses, de bien se tenir dans le caddie ® (DRO).

  • Indiquer à l’enfant : « si tu ne cris pas durant toute la durée des courses tu pourras choisir un jouet à la caisse » (DRL).

Concernant les blagues de Jean-Robert, nous pourrions lui dire, « tu ne peux pas faire de blagues en réunion ou lorsque l’on rencontre des partenaires » (DRL), s’il s’y tient, renforcer ce comportement (R+ social), lui dire par exemple, « dis-donc J-R tu as fait super impression pendant la réunion très pro, ta présentation a plu aux partenaires ».

Enfin, pour le DRH, prenons l’illustration d’un adolescent qui a du mal à se lever de manière autonome pour aller au collège. Cela met à bout ses parents parce qu’ils reçoivent les mots d’absence du collège et qu’il risque une sanction. Les parents pourraient alors utiliser un DRH pour augmenter le nombre de fois qu’il se lève seul. Supposons qu’actuellement l’ado parvient à se lever seul au moins une fois par semaine. Nous pourrions fixer l’objectif à deux fois par semaine. NB: nous ne devons pas mettre un objectif trop élevé, parce que sinon l’ado risquerait de ne pas parvenir à recevoir le renforcement et donc son comportement ne se modifiera pas. Il faut alors indiquer à notre ado, par exemple, s’il se lève de manière autonome deux jours de suite, nous lui préparerons son petit-déjeuner préféré le deuxième jour. Une fois que notre ado a atteint cet objectif plusieurs fois, on peut augmenter l’exigence pour obtenir le renforcement, passer à un objectif de 3 jours et ainsi de suite.

Conseils, pour optimiser la procédure d’extinction :

-Pour les DRA/DRI : choisir un comportement alternatif /incompatible que l’individu sait déjà faire (ou que l’on peut lui apprendre rapidement) ; Qui si possible demande autant ou moins d’effort. Utiliser des renforçateurs puissants, disponibles et renforcer de manière immédiate et systématique. On pourra par la suite estomper le renforcement.

  • pour les comportements autres (DRO) les renforcer fréquemment, faire attention de ne pas renforcer un autre comportement indésirable.

  • Pour les DRL, ce n’est pas tant la topographie qui gêne (c’est à dire le type/forme du comportement) mais sa fréquence. ex: parler d’un même sujet en boucle. Il faut donc penser à donner du feedback à l’individu, fixer à la fois une quantité autorisée et un intervalle entre deux émissions du comportement. ex: chéri j’adore quand tu me parle des nouvelles pièces sur ta moto mais une fois par repas c’est suffisant (DRl) j’aimerais bien que tu me racontes ta journée aussi (DRI), j’ai vu que ce soir passe ta saga préférée à la télé ça te dit qu’on la regarde ? (R+).

Finalement, puisque c’est par la généralisation et la répétition que les apprentissages s’opèrent, je vous partage deux vidéos géniales qui vous résument tout cela de manière très parlante :

  • 🎬 https://aba-strategies.fr/nos-videos/ (aller à la vidéo n°5)


  • 🎬 https://youtu.be/rV76ctPgD9o


Sources :


Heward, Heron, Neef, Peterson, Sainato, Cartledge, et al. (Eds.). (2005). Focus on behavior analysis in education: Achievements, challenges, and opportunities. Upper Saddle River, NJ: Prentice Hall/Merrill. ISBN 0-13-111339-9.



Magerotte, G. & Willaye, É. (2010). Lexique. Dans : , J. Forget, M. Rivard, Intervention comportementale clinique: Se former à l'A.B.A. (pp. 295-312). Louvain-la-Neuve: De Boeck Supérieur.






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